Le chant d’un soupir
J’ai les yeux qui se brouillent. Ils s’oublient dans le noir eux aussi. Je me perds dans des questions fades, qui n’ont pas de réponses. Je me retrouve isolée au bord de la mer où il n’y a rien. Le néant, la routine où l’impossible se mêlent autour de moi et frottent mes vêtements. Ils s’immiscent sous ma peau qui les transpire. Je suis la spectatrice directe de ce théâtre qui emmène mon cœur fatigué vers des lumières si petites qu’elles ne semblent pas exister. Et pourtant je n’ai pas le choix, je suis obligée de les suivre. D’aller vers l’inconnu. En soufflant. Puis peut-être un jour en marchant et en retrouvant mes sourires. Mes joies. Peut-être est cela, l’espoir ? Il y aura derrière ce temps des souvenirs brûlés. Ils seront nés d’outre-tombe et viendront mourir sur la jetée. Parmi l’écume, se meurtrissant sur les rochers, ils s’éteindront. Ils se perdront à tout jamais dans la terre et le ciel, frémissants d’émotions.
Ils seront à eux seuls la composition de cette vie. Dans l’accablement et la tendresse, ils porteront leurs fleurs jusqu’aux sommets des montagnes invisibles. Il y aura derrière ce temps des souvenirs brûlés. Ces archives viendront un jour nous bouleverser. Mais pour l’instant, ils sont un frémissement d’hier, ou peut-être demain. Ils se forment dans mes annales à la plume du présent. Je les savoure à la lueur de la chandelle d’une éternité sans nom. Parce qu’ils sont ce moment. J’espère que j’ai su t’écrire comme un sourire.
Et je termine ainsi, par le chant d’un soupir, une histoire sans point, puisqu’elle n’a pu s’ouvrir. Roberte Colonel 30/10/2017