Crue vous avez dit crue ?

Photo Pierre Villeneuve

Crue vous avez dit crue ? Pour mes amies qui se sont inquiété pour nous voici l’avenue de la Récanette ainsi que notre résidence presque propre !!! Enfin presque… car il nous faut encore attendre le nettoyage que ne manquera pas de faire la ville de Valras-Plage.

Nous allons chausser nos bottes et rejoindre les bords de mer .

Un véritable déluge s’est abattu sur notre ville de Valras-Plage…

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Le mauvais temps !… Un véritable déluge s’est abattu sur notre ville de Valras-Plage.

Certes l’image est jolie, mais l’est  moins ce qui s’ensuivit. Maisons, caves, garages inondées,  routes coupées où devenues impraticables. Rien n’a pu arrêter cette tempête de déferler sa mauvaise humeur sur notre commune. Elle fit de nombreux dégâts. Merci, elle n’a pas pris de vie humaine.

 

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Lorsque l’on voit les images d’inondation à la télé on ce dit « Les pauvres c’est bien triste!… moi-même je l’ai pensé sans levé le petit doigt pour venir en aide a toutes ses personnes démunie de leurs biens… mais lorsque cela se passe sous vos yeux l’approche devient différente. … Très vite notre générosité reprends le dessus, on se dit qu’il faut faire quelque chose pour aider les plus touchés par ce désastre. Dans notre ville nous venons de vivre ces alertes météos comme un rappel a notre bon sens. Aujourd’hui devant cette eau nauséabonde qui nous a envahi j’affirme que rien ici bas n’est définitivement acquis et que l’entraide est un geste de générosité humain que chacun d’entre nous pouvons faire. (Texte Roberte Colonel)

Fête de sainte Catherine…

 

 

 

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Sainte Catherine, protectrice des filles célibataires

Son refus de se marier explique tout naturellement pourquoi Sainte Catherine est la patronne des filles célibataires. L’expression « coiffer Sainte Catherine » qui signifie ne pas être mariée l’année de ses 25 ans s’explique par une tradition qui remonte au XVIème siècle. En effet, à cette époque, on renouvelait la coiffure de la statue de la sainte dans les églises, et c’était les jeunes femmes célibataires entre 25 et 35 ans qui se chargeaient de cette tâche. Il faut savoir que les hommes célibataires ont eux aussi leur saint patron en la personne de Saint Nicolas : en effet, tout comme on dit « coiffer sainte Catherine » pour les filles, on dit « porter la crosse de Saint Nicolas » pour les garçons… Vous avez 25 ans et aucun mari à l’horizon ? Pas de panique… D’abord, Mademoiselle, sachez que si vous ne voulez pas vous marier, Sainte Catherine vous protégera tout particulièrement car elle aussi refusa les liens sacrés du mariage… Nous vous souhaitons cependant de vivre un célibat plus gai que le sien ! =Pourquoi on les appelle « Les catherinettes » Dans quelques jours, le 25 novembre, des charmantes jeunes femmes de 25 ans vont arborer sur leurs têtes des chapeaux farfelus. Ces témoignages spectaculaires de leur célibat à cet « âge avancé » ont pour origine l’histoire la courageuse et téméraire sainte Catherine. C’est pourquoi on les appelle les « Catherinettes ». Au IVe siècle, en Egypte, à Alexandrie, sous domination romaine, la jeune Catherine, issue d’une famille royale, perd son père alors qu’elle n’est qu’une enfant. Très jeune, elle se passionne pour l’étude des sciences, des arts et de la philosophie, et fréquente les poètes et les penseurs de l’illustre cité. A l’adolescence, elle épouse, comme sa mère, la religion chrétienne. Après son baptême, illuminée par sa foi et dans un élan mystique, elle se sent « mariée » à Jésus. Un jour, l’empereur Maxence se rend à Alexandrie et exige que toute la population rende hommage aux idoles. Catherine, qui n’a que 18 ans, souhaite rencontrer l’empereur pour avoir une discussion avec lui afin de le convaincre de retirer son exigence. Maxence, prévenu de l’intelligence et de la force du verbe de Catherine, refuse cette joute oratoire. Il lui impose alors de s’exprimer face à une cinquantaine de philosophes convoqués pour la contrer. La jeune femme se montre si convaincante que certains penseurs se rallient à son propos. Cette très belle femme aua un verbe si séduisant que Maxence tombe sous son charme et lui propose de l’épouser. Catherine refuse, en lui opposant le fait qu’elle est mariée à Jésus. L’empereur, furieux d’un tel affront, la jette en prison. Touchée par la grâce et la sincérité de la jeune femme, l’impératrice lui rend visite dans sa geôle et implore l’empereur de la libérer. Ulcéré que l’on ose braver son autorité, Maxence la condamne à être suppliciée. Pour ce, il fait construire une machine faite de quatre roues munies de pointes acérées. Le jour de l’exécution, les pointes la déchirent. La légende veut qu’aucune goutte de sang ne sorte de son corps mais qu’à la place, du lait se répande tout autour d’elle ! Une des roues infernales se brisant même, si bien que pour en finir, Maxence la fait décapiter. Elle devient dès lors la patronne des jeunes filles vierges. Au Moyen Age, on a pour habitude de décorer et de parer les statues des saints, le jour de leurs fêtes. Le jour de Sainte-Catherine, les jeunes femmes non mariées et vierges décorent la statue d’une coiffe, un chapeau confectionné spécialement. Cette tradition perdure jusqu’à maintenant. Elle reste très vivace dans les métiers de la couture et du chapeau. Elle permet à chaque Catherinette de laisser libre cours à son imagination et à sa fantaisie pour créer et décorer son chapeau extraordinaire. Le 25 novembre, de nombreux bals des Catherinettes sont organisés. Alors, mesdemoiselles, à vos chapeaux, et, messieurs, venez faire tanguer le cœur des Catherinettes Les Catherinettes en fête le 25 novembre! Document lelopisi.org/index.phples_catherinettes

l’amour

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L’amour

Vous demandez si l’amour rend heureuse;
Il le promet, croyez-le, fût-ce un jour.
Ah! Pour un jour d’existence amoureuse,
Qui ne mourrait? La vie est dans l’amour.

Quand je vivais tendre et craintive amante,
Avec ses feux je peignais ses douleurs :
Sur son portrait j’ai versé tant de pleurs,
Que cette image en paraît moins charmante.

Si le sourire, éclair inattendu,
Brille parfois au milieu de mes larmes,
C’était l’amour; c’était lui, mais sans armes;
C’était le ciel… qu’avec lui j’ai perdu.

Sans lui, le cœur est un foyer sans flamme;
Il brûle tout, ce doux empoisonneur.
J’ai dit bien vrai comme il déchire une âme :
Demandez donc s’il donne le bonheur!

Vous le saurez : oui, quoi qu’il en puisse être,
De gré, de force, amour sera le maître;
Et, dans sa fièvre alors lente à guérir,
vous souffrirez, ou vous ferez souffrir.

Dès qu’on l’a vu, son absence est affreuse;
Dès qu’il revient, on tremble nuit et jour;
Souvent enfin la mort est dans l’amour;
Et cependant… oui, l’amour rend heureuse!

Poésies de Marceline Desbordes-Valmore

Précieuses minutes qu’on vole au temps…

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Ce ne sont pas les heures qui sont précieuses, ce sont les minutes. (George Bernard Shaw)

Précieuses minutes que celles qu’on vole au temps qui nous glisse entre les doigts comme du sable. Précieuses minutes que celles qu’on prend à tourner quelques pages dans la lumière du matin. Précieuses minutes que celles où les mots s’accrochent à nos yeux et troublent notre cœur. Précieuses minutes où plus rien n’a d’importance si non, celui du bonheur d’exister au travers d’histoires éternelles couchées sur papier. Histoire qui parle des autres, roman qui parle de vous.  Roberte Colonel

(peinture Carter-John-Michael)

 

 

 

Les maux de Sophie …

 Sophie se renversa en arrière et s’étira longuementElle n’aimait pas la vie qu’elle menait ; mais elle était seule à le savoir. Et de ce mystère elle tirait, en écrivaine rêveuse, une gamme de petites voluptés. Elle se plaisait à dire qu’elle y puisait d’inépuisables sources de joie. A fortiori, tromper un homme tel qu’Alexandre l’enchantait. Elle se réjouissait de n’être pour lui qu’une spécialiste de  mots et de frivolités, avide comme une éponge et douée pour les plaisirs. Il y avait en Sophie un être profond, carnivore, enfoui, qui n’aimait que la lumière.
Cependant elle éprouvait une légère inquiétude – lors qu’elle s’interrogeait sur le besoin  qu’elle avait d’Alexandre, et qui n’était pas seulement physique. « Mon pauvre ami, s’il  savait ! » Bien sûr le jeu d’amour avec cette force épaisse lui plaisait infiniment.  Elle reconnaissait à Alexandre un espoir de possession irrésistible, accompagné d’un instinct amoureux très juste. « Il savait faire », comme eussent dit les amies de Sophie. Ses mains d’orfèvre rêveurs et coléreux avaient le sens du corps de la femme – et Sophie ne rêvait rien de plus exaspérant, de plus aphrodisiaque ni de plus épuisant que ce modelage auquel il la soumettait jusqu’à l’hébétude heureuse. Elle éprouvait, cependant, aucune anxiété à savoir que pour un temps son corps à elle ne dépendait que de lui seul. « C’est dans l’ordre des choses. Et j’ai déjà connu ça. » L’exaltation d’être comblée, chez elle,  ne devenait jamais sevrage. L’essentiel était de garder son esprit clair et libre – au-dessus de la mêlée des membres, au-dessus des soupirs et des cris.
Or c’était là précisément, que se creusait l’inquiétude : l’esprit de Sophie était occupé d’Alexandre. »  – Il aime posséder se dit elle, mais il aime aussi être vaincu,  comme un enfant triste qui aurait perdu des êtres chers.
Ce qu’il déteste en moi,  ce qui l’attache à moi, ce sont les occasions que je lui donne d’être faible.
– Qu’est ce qu’il fabrique, ce salaud ?
Elle refaisait pour la dixième fois le compte dérisoire des jours :
«Son dernier message, ma réponse ça ne fait jamais que deux semaines ! – depuis le jour où il t’a confiait sa véritable  façon de vivre sa vie ! Il t’espace, ma fille ! Et voilà plus de dix jours que tu lui a écrit… Monsieur ce fait rare, Monsieur ne répond pas, Monsieur est un … Mais voilà la vérité : tu ne peux plus te passer de lui ! »  
Elle s’injuria comme elle savait le faire : bassement, sourdement, avec des mots  de charretier ivre. Cependant, elle s’observait dans la glace de la chambre. Ce visage, elle lui trouvait de l’amertume, un chagrin qu’elle ne lui connaissait pas. Elle s’approcha, considéra sa figure, son teint halé,  ces cheveux chatains foncés ,  –  et ce nez droit, ce menton allongé.
« Quand tu seras vieille, on ne verra plus que ton menton et ton nez ! » Murmura t-elle. Puis elle observa ses yeux verts dont le regard devenait fixe.
J’aimerais bien savoir avec qui  ce salaud, cet enfant de salaud me trompe !  Des injures lui venaient aux lèvres, qu’elle refoulait avec peine et parfois elle avait dû contenir un désir aigu de faire scandale. « C’est idiot ! Et ce n’est pas ce que je cherche. » Mais elle était obligée de recourir, pour se tenir en main, à toute sa volonté de femme. Elle joua un instant de cette idée. Mais la chose, a vrai dire ne lui importait guère. « Je suis la plus forte. »  Elle était une écrivaine sans grand talent, une affamée de tout ce qui ne rassasie pas. Elle n’en était que plus lucide. Elle s’observa de nouveau, et la glace lui renvoya  un visage que la perplexité rendait étrange et – charmant. Elle eut un rire intérieur, qui roula dans sa gorge. « Il n’y a pas de femme qui puisse m’enlever Alexandre ! »
Que cherchait – elle ? Sophie ne le savait pas clairement elle-même. Elle se sentait bizarrement écartelée : subissant à la fois la haine et l’attraction de l’invisible qu’elle niait et qu’elle ne voulait pas nommer.   Oui c’était l’amour d’Alexandre qu’elle cherchait là sans aucun doute. « Il y avait autre chose en elle.  Un besoin désespéré. Comme une volonté de détruire ce qu’elle aimait. Alors que dans la demi clarté de l’unique lampe, ses traits pâles revêtaient une sorte de pureté lointaine, inaccessible.
Sophie venait de parler à voix  haute, suivant sa pensée comme un fil d’Ariane. Instinctivement, elle s’était approchée de la glace et elle se regardait. Le visage, cette fois elle ne le reconnut pas : c’était un masque pâle, les pommettes saillantes y creusaient  les joues. Et ce pli au bord des lèvres, où  le ressentiment se lisait. Et ce regard enfiévré. « Arrange toi pour que Alexandre ne voie jamais cette tête là ! Jamais » (Texte Roberte Colonel) (Photo  d’Emily Blunt)

Maintenant que les mots ne viennent plus…

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Maintenant que les mots ne viennent plus
que le sable a comblé
la place du marché
que le temple est vide

Tu redeviens l’étranger
par qui l’inquiétude ancienne
psalmodie ses silences
sur nos mémoires effrangées

Vieille idole sacrifiée
tu retournes
dans les limbes sans coup
de feu sans intrigues

Alors parmi les ombres il ne restera
sur la piste muette
au centre du cercle rompu
que la silhouette d’un homme seul

un danseur
virevoltant
sur une valse
à quatre temps

(Poésie de Fulvio Caccia, Lilas) (peinture de Eric Armusik)

Souviens-toi que les jours passent sur toute chose…

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Voici extrait quelques pages de mon récit publié « Où es tu Maman ? » ensuite de mon manuscrit non publié à ce jour« Une vie à s’attendre » 

Ces pages auront leur place ici en ce jour de 1er novembre fêtes de la Toussaint et du 2 novembre jours des Défunts.

Information a ceux d’entre vous qui ne connaisse pas mon histoire :

Enfant de l’Assistance publique de la Seine, abandonnée en 1944 à l’âge de trois ans, j’ai pressenti très tôt que des événements me manquait, et que trop d’amour me liait depuis toujours à ma Maman. Il m’était impossible de laisser dormir mon dossier d’abandon et de souffrir sans savoir. Je vais donc entreprendre en 1999 des recherches douloureuses, longues, et obstinées, qui vont faire ressurgir des souvenirs qui m’aideront à faire de mon passé une merveilleuse histoire d’amour entre Maman et moi. Preuve que le sentiment inassouvi et la volonté d’aimer peuvent mener à la vérité.

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 Souviens-toi que les jours passent sur toute chose, estompent les actions, effacent les œuvres et font mourir les souvenirs, à l’exception de ce qui fut gravé dans le cœur des hommes par l’amour, et qu’ils se transmettent de génération en génération. » (Aristote)

 « Où es-tu Maman ? »

Nous étions partis pour le cimetière de Thiais en famille et tandis que nous en approchions, l’appréhension de me retrouver devant la sépulture de Maman m’effrayait. Dès notre arrivée, nous avons parcouru les nombreuses allées numérotées inscrites sur un plan. Puis nous avons compté une à une les tombes mortuaires à la recherche de la stèle de Maman. En dernier lieu nous n’apercevions autour de nous que des tombes en très mauvais étaits datées des années 1970 et abandonnées par les familles.

A ne pas trouver la tombe de Maman, j’étais désespérée. Un instant mes jambes furent privées de réflexes, elles semblaient ne plus pouvoir me soutenir, je ne parvenais plus à mettre mes pieds l’un devant l’autre, je me trouvais dans une situation de découragement total ; je ne cessai d’appeler Maman. En situation de folie je la suppliais de bien vouloir me faire un signe :  

-« Réponds-moi Maman, je suis là ! Réponds moi Maman, où es-tu Maman ? » J’avais tant de fois rêvé la retrouver et ceci bien sûr n’était resté qu’au niveau du rêve de la pure imagination… que de rester ici plongée dans cet endroit frontière entre elle et moi, entre passé et présent, le rêve d’un espace libre où je pourrais enfin lui dire combien elle m’avait manquée, combien j’avais espéré son retour.

-« Où es-tu Maman, réponds moi, je suis là Maman » : ces mots qui me venaient alors très précisément étaient ceux prononcés pendant la période de mon enfance.

Dans la magie de la nuit, lorsque j’étais enfant, j’appelais maman de toutes mes forces sans faire de bruit. C’est tout à fait étrange de ressentir aussi nettement, brutalement, que là dans ce cimetière les mots que j’ai dits, pas un de plus qui ne soit aussi précis. Pourquoi l’ai-je appelée encore de la sorte ? Je tapait les pieds, je voulais qu’elle m’entende, je la suppliais encore et encore, sans maîtrise. Comment ai-je pu pendant un moment avoir un tel égarement, dans mon comportement ?

Cependant, j’ai compris depuis peu que mon trouble n’avait rien à voir avec un caprice d’enfant. J’invoquais Maman parce que je voulais que mon rêve de petite fille trouve sa réponse dans ce cimetière, pour ériger un point d’ancrage auquel m’accrocher à elle dans ce lieu.

Maman avait pris son envol en ne me laissant aucune explication, il était vain de me dire « peu m’importe » ! Je voulais conjurer dans ce cimetière ma peur qu’un jour mes manques d’elle soient toujours en moi ; c’était bien au nom de ce refus obstiné de l’avoir perdue, qu’il m’importait encore de la rechercher.

« Je suis là Maman ! Où es-tu Maman ? Fais moi un signe, je t’en supplie, fais moi un signe pour que je puisse te retrouver ».

A-t-elle pu m’entendre dans son petit coin de ciel tout là-haut ? Non c’est impossible, j’observais ma famille compter les emplacements des tombes, leurs silhouettes se déplaçant au ralenti ; le flou de l’instant transformait leurs apparences en spectres fantomatiques, se détachant en toile de fond dans le cimetière ! J’étais dépossédée de tout discernement rationnel. Encore aujourd’hui il m’est impensable d’expliquer ce sentiment terrible que fut pour moi ce dédoublement de personnes.

Je regardais les fantômes (ma famille) se pencher sur un petit monticule de terre semblable aux autres tombes mal entretenues. Je me demandais ce que ces fantômes pouvaient bien faire à cet endroit. Sans savoir ce qui m’arrivait, j’étais détachée de ma famille et du visible qui m’environnait. Je ne suis sortie de ce cauchemar qu’au moment où j’ai entendu la voix de mon mari me préciser que d’après le plan qu’il avait entre les mains, la tombe de Maman se trouvait bien là où nous étions prostrés ! Penchée au- dessus de la sépulture, aucun signe visuel ou symbolique ne me permettait de supposer que ce fut bien l’endroit où Maman reposait. A l’instant même où mon mari a affirmé avec certitude que la tombe que nous recherchions était là sous ses pieds, que s’était-il donc passé pour que cet emplacement soit si dérisoire à mon coeur ?

En venant au cimetière à la recherche de l’endroit où devait se trouver le corps de Maman, je m’étais imaginée qu’il me serait facile de communiquer avec elle, mais rien ne s’était produit dans l’immédiat sur cette tombe… Jusqu’au moment où, de façon irrationnelle, tout fut à nouveau confus autour de moi. Je n’ai pas su réfréner l’appel intérieur qui me poussait à quitter l’emplacement où nous étions restés prostrés pour nous recueillir.

Je perdais pied une fois encore, j’essayais de lutter de toutes mes forces contre cette exaltation qui me soulevait de terre et me poussait à enjamber une petite allée entre deux tombes, face à celle où ma famille s’était posée. Une sépulture retint particulièrement mon attention. Je me souvenais être passée par deux fois à cet endroit et, mieux encore, je me rappelais avoir posé un regard critique sur cette tombe mal entretenue. Je m’étais indignée à haute voix trouvant qu’il était inadmissible, voire scandaleux, de laisser des sépultures en cet état ! Pour quelles raisons cette tombe me fascinait-elle autant ? Pendant un moment, je restais anéantie devant cette pauvre stèle craquelée, à moitié béante. Le couvercle de ciment censé recouvrir le cercueil était en très mauvais état, ceci sans doute dû aux nombreuses tourmentes des saisons.

Pourquoi une telle fascination pour l’endroit ? Mentalement je m’égarais, il me fallait essayer de comprendre ce qui m’attirait particulièrement à cet endroit. L’air ne pénétrait plus mes poumons je suffoquai, je vivais des minutes si troublantes, si émouvantes que mes jambes ne me soutenaient plus ; je chancelai. Comme s’il s’était agi d’un rêve, je fus happée en quelques secondes dans un tourbillon de douceur, cet égarement si soudain fut suivi d’un éblouissement de grande intensité, tandis qu’autour de moi tout se mit à vaciller. Incapable d’effectuer le moindre geste, je n’avais plus de contrôle sur mes réactions, je vivais un état rare et précieux. Cet endroit était extraordinairement bouleversant, y avait-il une raison particulière à cela ?  Le bleu du ciel était d’une douceur infinie, la lumière apaisante du soleil réchauffait mes épaules, et je sentis doucement la langueur s’emparer de mon corps. Je restais prostrée à fixer l’endroit, j’oubliais ce qui m’entourait, les minutes que je vivais m’offraient un refuge extraordinaire de paix. Je ne saurais pas dire si ce moment de contemplation dura quelques minutes, ou peut être que ce ne fut que quelques secondes ; instants surnaturels où il me fut si facile de ne plus souffrir en pensant à Maman. Bouleversée, je sortis enfin de ma léthargie pour reprendre doucement conscience sur la réalité de ma présence dans ce cimetière.

Au vue de mon étrange comportement mon mari s’alarma, il m’implora de quitter au plus vite ce lieu, je ne comprenais pas son insistance, ne pouvait-il donc pas me laisser en paix ?

Pour moi il n’était pas question de partir si vite, ce moment était magique, il ne pouvait pas exiger que je quitte déjà ce lieu. J’essayais de le convaincre que nous avions encore du temps devant nous avant de reprendre notre route… mais rien ni fit, il ne m’entendit pas, et bien malgré moi j’ai du le suivre, en abandonnant la stèle. Mais, comme l’on couvre d’une couverture un enfant pour qu’il ne prenne pas froid, j’ai pris le soin de reboucher l’emplacement béant de la stèle d’un morceau de ciment. Mon geste obéissait à une volonté insensée, j’étais en harmonie avec ma démarche : si dans les jours à venir, l’eau de pluie tombait très fortement sur la stèle elle ne pourrait pas s’infiltrer à l’intérieur de la sépulture !…

Je n’apprendrais que la semaine suivante que la stèle sur laquelle j’étais restée figée, à moitié inconsciente, que cette stèle était… celle où reposait Maman.

On peut s’interroger sur le fondement du rationnel, ou bien encore sur celui de l’irrationnel !

Mais alors, quelle explication peut-on donner sur cette vérité que je décris ? Quel est ce mystère qui me propulsa par deux fois justement à l’emplacement où se trouvaient les restes mortuaires de Maman ?

Bien sûr, nul autre que mon mari ne peut affirmer que ce que je décris est la vérité, mais qu’importe ! Moi, je reste extrêmement troublée par l’élan médiumnique qui avait servi d’intermédiaire entre Maman et moi.

Ferai-je un jour mon deuil de Maman ? Je n’en n’étais pas encore là. Ma douleur de ne pas l’avoir retrouvée de son vivant empêche pour l’instant ma complète guérison.

Ceux qui auront vécu de semblables événements comprendront-ils que l’on ne peut se débarrasser de ses maux, de continuer une histoire sans savoir précisément où celle-ci a débuté !

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Avec l’aimable autorisation de publié:  Photo Studio 56 Digital Imaging 

Quand nous ne savons plus faire un seul pas, la vie, elle, sait comment poursuivre. Là où nous désespérons de toute issue, elle en propose des dizaines. Il suffit de lui garder confiance. Il suffit d’aller jusqu’à ce point en nous, si ténu que le désespoir ne peut s’en saisir, comme il fait du reste. (C Bobin)

Quand la souffrance est trop présente et que l’on réussit à en parler, on peut penser que la guérison est imminente. Voilà pourquoi aucune histoire n’est innocente. 

Ce ci se passa quelques jours avant la relève du corps de Maman, je me sentais fatiguée, et je désirais prendre un peu de repos. C’était un samedi, et une bruine obscurcissait le ciel. Les nuages si sombres me faisaient penser à une journée de Toussaint.

Mon mari, installé confortablement devant le téléviseur, se passionnait pour un match de football, il était loin de se douter de ce qui allait se passer dans notre chambre a coucher. J’étais allongée sur mon lit, les yeux dans le vague lorsque soudain je sentis mes forces faiblir, il me sembla alors que mon corps flottait dans l’air. Hagarde je fixais les murs, une multitude de pensées envahissaient  ma tête quand je fus prise d’un vertige, tout au tour de moi se mit à vaciller. Et ce fut à ce moment que devant mes yeux je vis apparaître l’entrée d’un tunnel éblouissant de lumière, je pénétrais doucement à l’intérieur. J’avais la sensation  de marcher sur un tapis recouvert de ouate. Plus j’avançais plus la couleur devenait blanchâtre et douce. Ce n’était pas une hallucination, ce que je voyais de mes yeux était d’une beauté extraordinaire. J’étais si bien dans ce doux cocon douillet, que je ne fus pas surprise de voir apparaître Maman. Elle me tendait ses bras, me faisant signe  de la rejoindre. J’aurais aimé répondre à son appel, je me souviens de lui avoir tendu mes deux mains, ce moment fut d’une telle intensité de douceur, de quelle force ai-je donc bénéficié pour ne pas la rejoindre, alors que je la visualisais dans ce tunnel de lumière.

Je savais ce moment précieux : surtout ne pas bouger, ne pas avancer vers elle. Simplement échanger des mots, lui dire, non… la repousser doucement, me détourner d’elle, lui dire que c’est trop tôt, qu’au de là de toutes ces années à l’espérer nous pouvions encore attendre un peu pour nous rejoindre. Mais c’était trop cruel, pas un son ne parvenait à sortir de ma bouche.

– Pas maintenant, pas encore, non Maman, je ne peux pas encore te rejoindre, ce n’est pas le moment, j’ai tant de chose à faire ici.  Ce moment allait me quitter, je le savais ; ma résistance à ne pas vouloir m’enfoncer plus en avant dans le tunnel pour la rejoindre, allait ce refermer. Mais peu importe, un jour Maman reviendrait me chercher, je le sais.

Je n’avais pas vécu une expérience de spiritisme, mais peut-être ne pouvais-je pas aller plus loin que ce long, long moment d’immobilité au cours duquel j’avais eu la révélation d’avoir à prendre une décision. Une décision qu’un jour je prendrais. Je me sentais impuissante, comme dans un rêve où l’on court s’en savoir si on veut atteindre une destination ou si l’on fuit, où l’on sait seulement qu’il faut que l’on avance malgré ses jambes de plomb.

J’ai repris doucement conscience, et pour ne pas sombrer à nouveau je me suis levée et je suis allée demander de l’aide à mon mari. Il me dit ne rien pouvoir faire pour moi, et je compris qu’il était trop passionné par son match de football ; Je vis qu’il ne m’écoutait que d’une oreille. Cependant, j’avais besoin d’aide, c’était urgent sinon j’allais perdre la raison pour de bon. La seule solution raisonnable qui me vint à l’esprit fut d’appeler le docteur Boris Cyrulnik, Neuropsychiatre auteur de nombreux livres. Boris Cyrulnik avait été mon Maître en écriture pour l’approche de mon livre « Où es-tu Maman ? ». J’eus aussitôt l’envie de lui parler de cette expérience. Je me souviens combien j’avais crains de le déranger au téléphone, cependant je ne doutais pas que s’il se trouvait chez lui, il prendrait quelques minutes de son temps pour m’aider. Ce qu’il fit avec toute la gentillesse qui le caractérise. Je lui racontai comment, allongée sur mon lit, je m’étais sentie soudainement éperdue d’angoisse, Je parlais de mon entrée dans le tunnel lumineux, de l’appel que me lançait Maman en me tendant ses bras, de ma détresse de n’avoir pu la suivre. Avec compassion, Monsieur Cyrulnik m’aida à comprendre mon malaise. Il me persuada que je n’avais pas perdu la raison comme je le prétendais

– « Non Madame vous n’avez pas perdu la raison, votre souffrance est telle qu’il vous est difficile d’accepter de couper le cordon ombilical d’avec votre maman » ; il m’apaisa, me conseilla de ne pas garder les cendres de Maman dans notre appartement mais de les porter au columbarium de ma ville dès notre retour de Paris. Il continua pendant quelques minutes de me rassurer et lorsque prit fin notre entretien, j’étais de nouveau confortée de l’utilité d’avoir su aller jusqu’au bout de ma démarche et d’obtenir que me soient rendus les restes mortuaires de Maman. Non je ne devenais pas folle, il s’était bien passé quelque chose là-haut, quelque chose dans l’au-delà entre Maman et moi.  

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« Tout récit participe à la naissance d’un sentiment qui construit nos espoirs, nos tristesses et nos étrangetés. » (Boris Cyrulnik)

La relève du corps de Maman.

-Était-ce bien Maman que l’on allait installer dans ce petit cercueil de bois ?   Comment feront ils pour déposer maman dans le cercueil il est si petit ? Et pourquoi un si petit cercueil, alors que j’avais appris que Maman était très grande ?

Non, ce ne pouvait pas être Maman…

Et si le personnel du cimetière avait fait une erreur en se trompant de numéro de sépulture ! 

Ma tête. -oh ! Ma tête ! J’avais si mal. Je n’arrivais plus à maîtriser les petits tremblements de mes mains, de mon corps. À vouloir me convaincre d’arrêter de trembler, mon corps se tétanisait. J’avais beau cherché à me raisonner, mes bras et mes jambes étaient agités de petits mouvements saccadés, je les ai imploré; pour qu’ils arrêtent d’osciller de la sorte ! Je devais impérativement me calmer, me résonner, il était indécent de vouloir récupérer le corps de Maman, alors que j’étais dans cet état. Je serrais mes mains l’une dans l’autre, pensant pouvoir réussir à vaincre mon chagrin, mais cette pensée n’était qu’illusoire, car rien n’y faisait ! Ma peine était trop forte. Je jugeais mon comportement parfaitement débile, ma conduite n’était pas digne de l’objectif que je m’étais fixé ! Il me fallut de longues minutes d’égarement avant de prendre réellement conscience que c’était bien les restes mortuaires de Maman qu’allait m’octroyer le personnel du cimetière.

J’avais attendu ces instants-là depuis si longtemps, qu’à force de lutter contre ma souffrance, j’étais maintenant épuisée. Je me souviens que pendant un court instant je n’avais plus su ce que j’étais venue faire dans le cimetière… et, j’avais entrepris de nouveau une conversation avec moi-même…S’agissait-il de venir chercher Maman ? -Oui bien sûr, mais pourquoi ici ? Parce que c’était sa dernière demeure. Je n’arrivais plus à maîtriser mon émotion ; je ne comprenais plus rien de ce qui m’arrivait. Une douleur terrasse mes mains, mon visage, mon ventre. J’allais mourir ici, à cet endroit, j’avais si mal !

Et puis, que faisait donc mon mari à se tenir ainsi, penché au dessus de ce trou colossal creusé le matin même par les employés? Que faisait-il donc là-bas, au lieu de se trouver près de moi ? Pourquoi n’était-il pas à mes côtés, à m’entourer de ses bras pour me réchauffer ? Je ne raisonnais plus avec discernement ; je n’étais plus dans une logique normale, mais dans un état de choc, égarée, proche de la folie. C’était une de ces situations qui durent un temps insupportable, un de ces moments si douloureux à vivre que ceux à qui une situation similaire n’est pas arrivée auront sans doute bien du mal à comprendre.

Je n’eus que quelques minutes de recueillement la main posée sur le cercueil avant que la porte du fourgon funèbre se referme, emportant Maman au funérarium du Père-Lachaise. Je serais conviée deux jours plus tard à venir reprendre les cendres de Maman. Mon mari et moi étions attendus à neuf heures, pour la remise des cendres. Dès notre arrivée au Père-Lachaise, le Directeur du cimetière est venu nous saluer et nous remettre l’urne. Il connaissait un peu l’histoire qui me liait à Maman, et c’est sans doute parce qu’il le savait qu’il eut ce geste magnifique envers moi. Il prit doucement ma main, la posa sur l’urne où se trouvaient les cendres de Maman, puis il m’aida à mettre mon autre main pour l’enserrer. Ce fut un moment si fort qu’il m’est impossible d’en oublier le moindre détail. Dans ma tête, dans mon cœur, je ne réalisais pas que c’était les cendres de Maman qui se trouvaient en ma possession, dans l’urne que je tenais serrée entre mes deux mains, c’était Maman.

Avant notre départ, le Directeur eut encore cette délicatesse il m’avait semblé lui entendre me dire : -« Madame, prenez soin de votre maman », alors qu’il avait simplement dit :- « Madame prenez soin de l’urne de votre Maman ». Ce professionnel, habitué de voire tant de situations douloureuses, avait compris ce que je ressentais si fort. Notre retour de Paris se passa bien. Nous avions mis la boite en velours bleu foncé, contenant l’urne et les cendres de Maman, dans le coffre de notre voiture. J’avais obtenu ce que je m’étais fixé pendant des mois, à savoir ramener les cendres de Maman dans le cimetière de ma commune. Cependant je n’arrivais toujours pas à intégrer dans ma tête que tout ce que j’avais entrepris était fini ! A notre arrivée chez nous, j’ai pris l’urne et l’ai montée dans notre appartement. Le lendemain matin, j’ai demandé à mon mari et à notre fils de me laisser seule, pour être dans une totale intimité avec Maman. J’ai ressorti doucement l’urne de sa boite et j’ai entrepris de faire le tour de notre appartement avec Maman. Je lui ai raconté notre vie, lui ai montré des photos de nos enfants, de nos petits-enfants, après  un long moment  , j’ai remis doucement l’urne dans sa boite de velours. L’après-midi nous sommes partis en famille au cimetière placer l’urne à l’emplacement que nous lui avions réservé face à la montagne enneigée.

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