Menuet d’automne…

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Menuet d’automne

Les astres et les véroniques

De leurs corolles sans parfums,

Laisse tomber sur les parterres,

Où d’autres fleurs ne s’ouvrent plus

La tristesse mystique et lente des adieux

 

Mauve tendre et vert alanguie,

Leurs teintes vagues s’harmonisent

Aux ciels lavé du prime automne,

A la souriante langueur

Des beaux jours, près de s’envoler.

 

Bouquet de souvenir et non bouquet de deuil

L’or violent des chrysanthèmes,

Le sang pourpre des dalhias,

N’altèrent point leurs éclats doux

 

En mineur, d’une voix éteinte

Et sur un mode atténué, les asters et les véroniques,

Au vent fraîchi qui les caresses,

Marmonnent des refrains d’adieux.

 

C’est la saison prestigieuse

Où les arbres portent des feuilles

De topaze et de rubis,

Ou la grive à travers

Les pampres fauves

De rutilante orfèvrerie. (Laurent Tailhade) (1856-1919)

Pour la Toussaint nos cimetières sont fleuris de cyclamens, de bruyères et surtout de chrysanthèmes.

Le chrysanthème est une fleur lumineuse !

Dans des pays autres que chez nous, il est le symbole de la perfection et de la joie.

Mais savez-vous que le chrysanthème est originaire de Corée, qu’il est passé par la chine et le Japon avant d’être introduit en France en 1789.

 Fleur culte au japon, il a été l’emblème de la maison impériale, la légende lui accorde de nombreuses vertus, dont celle de Chrysanthème Comestible. (doc :blog prima.overblog)

 

 

 

On écrit mieux quand l’âme est perturbée

On écrit mieux quand l’âme est perturbée, quand le cœur s’emballe, parce que les textes traînent un trouble, une souffrance de la vie. (Isabelle Barry)

Les mots s’emballent et je ne peux les retenir. Le temps a cicatrisé mes blessures mais un mot de trop et tout chavire autour de moi. Je ne maîtrise plus les battements de mon cœur, mes pensées sont insensées et je vole, vole vers des horizons fantasmagorique. Je ne suis plus moi mais l’écrivaine d’hier qui pouvait couvrir de mots ses pages blanches de souffrance, de tristesse, de regrets. Ce soir une inconnue est venue troubler ma douce quiétude de fin d’après midi.  Sa voie est a peine audible pourtant je perçois chez elle une tristesse infinie. Elle me dit avoir lu mes livres et soudain je m’inquiète. Elle me téléphone d’un département que je connais très bien pour y avoir passé de nombreuses années en premier pour mes études puis, dans ma vie professionnel. En lectrice fidèle elle me demande si j’ai publié mon troisième livre comme je m’étais engagée à le faire. Je suis étonnée de voir qu’au bout de huit longues années elle ne m’est pas oubliée.

L’écrivain est une personne ordinaire, peut être est-on un peu plus sensible que d’autre, ce qui fait que lorsque j’écrivais je ne mesurais pas la portée de mes  écrits. Ce soir je prends conscience que ma trace écrite est restée gravée dans le cœur de cette dame. Tout au long de mes dédicaces j’ai reçu beaucoup de témoignages mais ce soir celui de cette dame me rend tout à la fois humble et émue. Je me dis que rien ne s’oublie jamais lorsque que l’on a su laisser parler son cœur. Mon livre « Où Es tu Maman ? » Un  Récit,  témoignage d’une enfance abandonnée. L’histoire que vient de me confier cette dame est différente et toute aussi bouleversante que fut mon histoire. Je me devais de l’entendre tellement est grande sa détresse. Avant d’entreprendre l’écriture de mon manuscrit aucune  personne  n’avait  réellement voulu entendre ce que j’avais à dire sur mes souffrances d’enfant. Ce soir je comprenais d’autant mieux cette dame sur sa quiète de vérité sur ses origines. Les encouragements que je viens de lui prodiguer l’aideront sans doute à trouver un peu sérénité. Mes encouragements l’aideront aussi à déposer ses maux sur les pages de son cahier. Elle n’est plus seule… je serais là. (Texte Roberte Colonel)

 (Peinture Prieto- Evangelina)

« Nous sommes tous un peu sourds quand cela arrange notre bonheur. Cela repose un peu de ne pas tout entendre. » (Thar Ben Jelloun)

 

« Le vrai écrivain n’est pas celui qui raconte des histoires mais celui qui raconte dans l’histoire la sienne et celle plus vaste du monde dans lequel il vit. » (Citation Philippe Rhot)

Le mauvais garçon, c’est avant tout celui qui ne nous convient pas…

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Le mauvais garçon, c’est avant tout celui qui ne nous convient pas.

Un article que je viens de lire et l’envie de le partager avec vous sur mon blog .

Getty Images/i Stockphoto

Qui n’a pas au cours de sa vie craqué pour le mauvais garçon, sur le front duquel il est pourtant écrit en lettres énormes et lumineuses:« Danger, briseur de coeur »? Difficile d’en expliquer les raisons, mais pour notre plus grand malheur, le bad boy, entendons par là l’homme qu’il ne nous faut surtout pas, est doté d’un pouvoir d’attraction inversement proportionnel à sa fiabilité. Pourquoi un tel manque de lucidité? Pourquoi, en dépit de ce que l’on pourrait prétendre, la gentillesse n’est pas forcément ce qui nous fait fondre en premier chez l’autre? 

« Pour répondre à ces questions il faut tout d’abord définir ce que l’on entend par « mauvais garçon », explique la psychologue Patricia Delahaie (1). « Selon moi, plus que le voyou ou le rebelle, c’est celui qui ne nous aime pas et qui va nous faire du mal« . Autrement dit, le bad boyn’est pas toujours celui que l’on pense et ne se reconnaît pas forcément au premier abord. « Un homme n’est pas forcément un bad boy dès le début, ou au contraire il l’est mais ne le sera pas avec nous. Ce sont les sentiments que l’on va éprouver au fur et à mesure de la relation qui vont nous mettre sur la voie ». Et de glisser que cela vaut également pour les hommes qui tombent ou croient tomber amoureux de bad girls (mauvaises filles). 

Lorsque l’on confond « résistance » et « virilité »

Plus que les « mauvais garçons », ce qui attire, suggère par ailleurs Patricia Delahaie, « c’est la résistance ». « On a tendance à assimiler résistance et virilité, au risque de se tromper sur ce que l’on ressent vraiment ». « J’ai toujours été comme cela, confesse Audrey, 39 ans. Je me souviens, petite, je regardais Candy. Et celui qui me plaisait c’était Albert, avec son regard ténébreux et sa fâcheuse tendance à prendre la fuite quand les choses devenaient sérieuses. Anthony, le doux prince aux yeux bleus, je le trouvais super niais. Idem dans la majorité des comédies romantiques. C’est le vilain qui me plait: dans Bridget Jonespar exemple, c’est Daniel Cleaver, ce menteur dragueur invétéré qui me ferait courir pieds nus sous la neige et pas Mark Darcy, le bon parti, pourtant ». 

Ce penchant pour ceux qui ne lui veulent pas que du bien, Audrey l’a aussi pour les hommes « dans la vraie vie »: « je ne le fais pas exprès, mais mon coeur bat tout de suite beaucoup plus vite pour un type un peu volage, un peu énigmatique, qui va me glisser entre les doigts, me rappeler quand ça lui chantera, me faire passer des soirées à vérifier que mon téléphone n’est pas en dérangement. J’aurais pu faire ma vie il y a quelques années avec un vrai gentil. Mais la vérité c’est qu’il n’y avait pas de défi, je m’ennuyais ». 

Amalgamer « amour » et « défi »

Cette notion de « défi », Patricia Delahaie estime qu’elle n’a pas grand chose à voir avec l’amour. « S’aimer, c’est se faire du bien, c’est fabriquer du bonheur. Lorsque l’on est dans une espèce de compétition, dans un jeu de chat et de la souris, suis-moi je te fuis, fuis-moi je te fuis, on se situe plus dans une relation passionnelle, qui n’a souvent que peu d’avenir à long terme ». Pour la psychologue, « lorsque le schéma se répète sans cesse, que l’on multiplie les relations amoureuses toxiques qui font mal et que seuls les hommes ne nous aimant pas nous séduisent, il faut s’interroger sur ce que l’on cherche vraiment ».  

« Souvent, les femmes qui craquent systématiquement pour celui qui ne leur conviendra pas ont eu à se battre durant leur enfance pour obtenir de l’amour et pensent inconsciemment qu’elle ne peuvent aimer et être aimées qu’ainsi, dans un esprit de conquête », analyse Patricia Delahaie. Isabelle 36 ans, et « championne du monde des choix amoureux foireux » a quant à elle compris qu’en essayant toujours de conquérir « le garçon que tout le monde essaie d’apprivoiser », elle tentait de se rassurer sur son propre cas. « Il y avait quelque chose de très narcissique dans ma démarche, comme je n’arrivais pas à m’affirmer dans une bande et dans la vie, être la petite amie du mec cool me donnait une stature. Sauf qu’en réalité j’étais son ombre, rien de plus. » 

Une question d’hormones? 

Et si, plus qu’une propension à choisir le mauvais garçon, les femmes étaient victimes de leurs hormones? C’est en tout cas ce que suggère une étude de l’Université du Texas, pilotée par la chercheuse Kristina Durante. Selon cette dernière, lorsque les femmes sont en pleine période d’ovulation, elles se sentent plus attirées par les beaux parleurs, un profil d’hommes qu’elles rejetteraient en temps normal. Inconsciemment, « les hormones associées à la fertilité les conduiraient à se faire des illusions sur ce type d’hommes et à penser que ces derniers pourraient être des partenaires dévoués et de meilleurs pères, sans s’interroger au préalable sur leur fiabilité ». 

Croire qu’on va « pouvoir le faire changer »

« Ce qui interroge en réalité, ce n’est pas forcément cette attirance pour les bad boys – après tout, oui, parfois cela peut être un peu excitant de séduire le caïd de la bande – mais plutôt cette question: combien de temps on reste alors qu’il nous fait souffrir? » Parce qu’en effet, la « magie » du bad boy dure parfois plus qu’une folle soirée. 

« Ce qui m’avait plu chez Yann au départ, c’était son côté chef de bande, raconte Sophie, 32 ans. Je m’étais inventée, je crois, que je le changerais, qu’il cesserait d’être cet indomptable écorché vif. J’ai mis trois ans à comprendre que je m’inventais des histoires. Non seulement en effet je ne l’ai pas changé mais surtout, je me suis rendue compte au bout de trois ans de vie commune qu’il n’était pas si séduisant. Voire même qu’il était un peu pathétique, à plus de trente ans, avec sa grosse moto et ses journées passées au bar plutôt qu’à chercher un boulot. Surtout, vivre avec quelqu’un dont on a sans cesse peur qu’il s’en aille, c’est épuisant. »  

Aujourd’hui, après avoir congédié son motard, Sophie coule des jours tranquilles avec son nouvel amoureux, « beaucoup moins ténébreux mais gentil, tout en sachant exactement ce qu’il veut pour nous ». « Je découvre à quel point c’est bon d’avoir confiance, de ne plus me faire un sang d’encre qu’il m’annonce que finalement c’est terminé, qu’il a trouvé mieux ailleurs. Et le quotidien avec lui, je ne le trouve pas ennuyeux mais doux et reposant ».  

La gentillesse, une qualité pourtant hautement désirable

« L’idéal, confirme Patricia Delahaie, c’est peut-être un gentil, avec du caractère. Je crois que les femmes n’aiment pas fondamentalement les mauvais garçons. Ce qui n’est pas très séduisant peut-être, c’est l’incapacité à prendre des initiatives ou des décisions, ce qu’on pourrait qualifier de mollesse. Mais l’honnêteté, la gentillesse, la tendresse, ce sont des qualités hautement désirables ». Et de conclure: « Il faut se vouloir du bien en amour, avant tout! » Un mantra qu’Isabelle a fait sien depuis sa rencontre avec David. « Il n’est pas celui que l’on va remarquer en premier, mais lui me remarque justement, et me rend enfin heureuse ». Et si la maturité amoureuse finalement, c’était cela,désirer quelqu’un qui nous fait du bien? 

(1) Ces amours qui nout font mal, Comment guérir d’une relation toxique? Patricia Delahaie, éd. Marabout 

Journaliste, Caroline Franc Desages est aussi l’auteur du blog » Pensées de ronde » 

En savoir plus sur http://www.lexpress.fr/styles/psycho/pourquoi-les-bad-boys-sont-ils-si-attirants_1612167.html#eADIv7ulXAVOSyRw.99

Un poète

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UN POÈTE

Laissez-le vivre ainsi sans lui faire de mal!
Laissez-le s’en aller; c’est un rêveur qui passe;
C’est une âme angélique ouverte sur l’espace,
Qui porte en elle un ciel de printemps auroral.

C’est une poésie aussi triste que pure
Qui s’élève de lui dans un tourbillon d’or.
L’étoile la comprend, l’étoile qui s’endort
Dans sa blancheur céleste aux frissons de guipure.

Il ne veut rien savoir; il aime sans amour.
Ne le regardez pas! Que nul ne s’en occupe!
Dites même qu’il est de son propre sort dupe!
Riez de lui!… Qu’importe! il faut mourir un jour…

Alors, dans le pays où le bon Dieu demeure,
On vous fera connaître, avec reproche amer,
Ce qu’il fut de candeur sous ce front simple et fier
Et de tristesse dans ce grand œil gris qui pleure!

( Poème de d’Émile Nelligan)

 

Celui…

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CELUI

Celui qui ne m’a pas parlé d’amour
M’a plus appris m’a plus donné
Que ceux qui m’en ont trop compté

Celui qui ne m’a pas embrassée
M’a plus donné m’a plus appris
Que ceux qui m’ont trouvé jolie

Celui qui ne m’a jamais caressée
M’a révélé plus de splendeurs
Que ceux qui m’ont offert leur cœur

Celui qui ne m’a jamais fait l’amour
M’a mieux comprise et mieux aidée
Que toi qui prétendais m’aimer

Sans faire un geste sans un bruit
Il m’a découvert des pays
J’ai vu des jardins suspendus
À la beauté de ses mains nues
Il n’est pas de plus pur écrin
Que ses mains qui n’exigeaient rien

Celui qui ne regardait pas mes yeux
Mais le monde autour de nous deux
M’a fait voir qu’il est merveilleux

Celui qui ne m’a pas donné d’enfant
M’a fait aimer tous les mendiants
Les solitaires et les errants

Celui qui ne m’a jamais possédée
Qui n’a pas voulu m’enfermer
Pour qui l’amour est liberté

Celui qui ne m’a pas parlé d’amour
M’a plus appris m’a plus donné
Que toi qui prétendais m’aimer

Françoise Mallet-Jorris  ( peinture de Frank Russell Wadsworth)

J’aime imaginer

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Trouver chaque jour matière a intéressé le lecteur c’est parfois difficile lorsque les mots ne s’écrivent pas… je me dis que se sera plus facile demain. Que la nuit porte conseil mais voilà qu’aucune idée ne surgie de mon sommeil pour de me délivrer de mon angoisse, ma page reste désespérément blanche. Il ne me reste qu’une solution celle de chercher l’image qui me fera rêver, imaginer, inventer l’histoires en regardant la toile.

J’aime imaginer ce qui se trame derrière les couleurs, les poses, les décors. Je me mets en position de la lectrice qui s’invente peut-être tout un monde à partir de quelques phrases tracées sur mon billet et destinées à un improbable lecteur.

Et tant pis si je ne sais faire que ça. Ou tant mieux. Parce que quelques phrases que je poserai ici trouveront peut-être le cœur de celle ou celui à qui elles sont destinées. Quelqu’un dont j’ignore tout et qui à la lumière de quelques mots se sentira revivre. Quelqu’un échoué ici par hasard ou parce qu’on lui aura indiqué le chemin et qui sera touché. Oui, tant pis si je ne sais faire que ça. Inventer des histoires à des toiles. Et rêver. Il y a pires maux que cela ne pensez vous pas ? (Roberte Colonel)

 Peinture Steel-Victor-Danfrey

Les mots qu’elle ne lui a pas dit …

Les mots qu’elle ne lui a pas dit s’inscrivent dans un déferlement de bonheur, de tendresse, il les lira.

Puis il répondra avec ces mots a lui ceux qu’il si bien transcrire pour lui dire qu’il l’aime et qu’elle lui manque. Ainsi vont leurs mots de l’un à l’autre rejoindre leur deux cœurs. Comme ils sont doux ces moments où elle écrit, où elle laisse aller sa plume sans retenue. Comme ils sont doux ces moments de complicité entre les mots et lui. Parce qu’il la lit toujours. Mieux qu’un autre.
Comme ils sont doux ces moments où l’écrivaine sait qu’elle n’écrit pas en vain et que son destinataire saura reconnaître même ce qu’elle ne dit pas.
Ce qu’ils sont doux ces moments entre elle et lui, où le je se dessine parfois, tandis qu’elle parle d’un arbre ou d’une chanson où de tout autre chose.
Comme ils sont doux ces moments où la vie s’arrête le temps de la phrases sur le papier. Roberte Colonel

 Des mots tombent des nuages.

Tombent pour tomber,
non pour qu’on les recueille.
Ils tombent pour se refaire
dans la tension la plus tranquille.
Soudain,
Un de ces mots reste comme suspendu dans l’air.
Alors, je lui donne ma chute.
(Roberto Juarroz)

peinture de Tony Merrithew

La vie est comme un voyage en mer…

La vie est comme un voyage en mer, il y a des jours de calme et des jours de tempête, le plus important est de se conduire en bon capitaine.  (Jacinto Benavente)

Jacinto Benavente y Martínez est un écrivain espagnol qui a reçu le Prix Nobel de littérature en 1922. Il est un des dramaturges espagnols les plus importants de son siècle.  Wikipédia

Naissance : 12 août 1866, Madrid, Espagne 

Décès : 14 juillet 1954, Madrid, Espagne Filmographie : La Mal aimée, La malquerida Distinctions et récompenses : Prix Nobel de littérature

Automne

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Le vent tourbillonnant, qui rabat les volets,
Là-bas tord la forêt comme une chevelure.
Des troncs entrechoqués monte un puissant murmure
Pareil au bruit des mers, rouleuses de galets.

L’Automne qui descend les collines voilées
Fait, sous ses pas profonds, tressaillir notre coeur ;
Et voici que s’afflige avec plus de ferveur
Le tendre désespoir des roses envolées.

Le vol des guêpes d’or qui vibrait sans repos
S’est tu ; le pêne grince à la grille rouillée ;
La tonnelle grelotte et la terre est mouillée,
Et le linge blanc claque, éperdu, dans l’enclos.

Le jardin nu sourit comme une face aimée
Qui vous dit longuement adieu, quand la mort vient ;
Seul, le son d’une enclume ou l’aboiement d’un chien
Monte, mélancolique, à la vitre fermée.

Suscitant des pensers d’immortelle et de buis,
La cloche sonne, grave, au coeur de la paroisse ;
Et la lumière, avec un long frisson d’angoisse,
Ecoute au fond du ciel venir des longues nuits…

Les longues nuits demain remplaceront, lugubres,
Les limpides matins, les matins frais et fous,
Pleins de papillons blancs chavirant dans les choux
Et de voix sonnant clair dans les brises salubres.

Qu’importe, la maison, sans se plaindre de toi,
T’accueille avec son lierre et ses nids d’hirondelle,
Et, fêtant le retour du prodigue près d’elle,
Fait sortir la fumée à longs flots bleus du toit.

Lorsque la vie éclate et ruisselle et flamboie,
Ivre du vin trop fort de la terre, et laissant
Pendre ses cheveux lourds sur la coupe du sang,
L’âme impure est pareille à la fille de joie.

Mais les corbeaux au ciel s’assemblent par milliers,
Et déjà, reniant sa folie orageuse,
L’âme pousse un soupir joyeux de voyageuse
Qui retrouve, en rentrant, ses meubles familiers.

L’étendard de l’été pend noirci sur sa hampe.
Remonte dans ta chambre, accroche ton manteau ;
Et que ton rêve, ainsi qu’une rose dans l’eau,
S’entr’ouvre au doux soleil intime de la lampe.

Dans l’horloge pensive, au timbre avertisseur,
Mystérieusement bat le coeur du Silence.
La Solitude au seuil étend sa vigilance,
Et baise, en se penchant, ton front comme une soeur.

C’est le refuge élu, c’est la bonne demeure,
La cellule aux murs chauds, l’âtre au subtil loisir,
Où s’élabore, ainsi qu’un très rare élixir,
L’essence fine de la vie intérieure.

Là, tu peux déposer le masque et les fardeaux,
Loin de la foule et libre, enfin, des simagrées,
Afin que le parfum des choses préférées
Flotte, seul, pour ton coeur dans les plis des rideaux.

C’est la bonne saison, entre toutes féconde,
D’adorer tes vrais dieux, sans honte, à ta façon,
Et de descendre en toi jusqu’au divin frisson
De te découvrir jeune et vierge comme un monde !

Tout est calme ; le vent pleure au fond du couloir ;
Ton esprit a rompu ses chaînes imbéciles,
Et, nu, penché sur l’eau des heures immobiles,
Se mire au pur cristal de son propre miroir :

Et, près du feu qui meurt, ce sont des Grâces nues,
Des départs de vaisseaux haut voilés dans l’air vif,
L’âpre suc d’un baiser sensuel et pensif,
Et des soleils couchants sur des eaux inconnues…

Magny-les-Hameaux, octobre 1894.

Albert Samain, Le chariot d’or

Poème classé dans Albert Samain, Automne, Lieux. (image blog Lalitoutsimplement.com/